L’”intégrité” de Madame Marois : nouveau mot d’ordre au Québec ?

Written by Bernard Brault on 20/09/2012

Mais vous avez dit intégrité ?

Notre nouvelle première ministre, Madame Marois, a constitué hier son premier cabinet. Elle a annoncé ses quatre piliers philosophiques, l’intégrité, la prospérité, l’identité et la solidarité. Si les trois derniers termes peuvent être associés à des valeurs sociales, l’intégrité sera un enjeu différent, complexe et risqué. Quelle définition lui donnera-t-on ? Celle de l’éthique ou celle de la gestion et de la gouvernance saine ?

L’intégrité est sans équivoque ce qui sera désormais rappelé à chaque jour aux nouveaux ministres et députés qui forment maintenant ce nouveau gouvernement.

L’excitation des appelés au cabinet, la déception ou l’espérance des autres députés seront encadrées en cas de débordement par plusieurs chiens de garde, dont les chefs de cabinet nommés par la première ministre. La dame de béton aura, sans doute, aussi une main de fer gantée. Cela sera-t-il suffisant ?

Malgré la bonne volonté du nouveau caucus, dans le contexte actuel des lois et des coutumes des leaders, gestionnaires et décideurs, cette intégrité ne sera peut-être que bien fragile. Certains décriront, surtout les deux oppositions, cette intégrité comme superficielle.  Au nom de l’intégrité et de la vertu pourrait commencer une chasse aux sorcières. Jusqu’où ira l’inquisition ? Venant de l’interne ou de l’externe, cette inquisition pourrait tourner au cauchemar parce que s’introniser avec le titre d’incorruptible attirera les mouches comme du miel. Demandez à Jacques Duchesneau, maintenant député de St-Jérôme !

Mais de quelle intégrité parlons-nous ?

Il n’y a pas si longtemps, peu de leaders du privé s’inquiétaient des traces qu’ils laissaient sur leur passage. Lorsqu’ils passent au public, seront-ils subitement sous la rampe des projecteurs pour leurs comptes de dépenses passés, leurs voyages au frais de la princesse et non déclarés à titre d’avantages imposables, aux autres avantages gonflables indus, donc secrets, aux attitudes volontaires d’aveuglément devant des faiseurs d’élection, au financement occulte et aux enveloppes brunes qu’ils n’auront jamais vu remettre dans les mains de leurs financiers de campagne ?

Péchés véniels et péchés mortels !

Un bon exemple concerne cette question anodine des points « voyages ». Les grands voyageurs savent tous comment utiliser des points découlant de leurs nombreux voyages d’affaires pour partir en vacances avec la famille. Les autorités fiscales ont annoncé depuis longtemps que cette pratique consiste en un avantage imposable, dont l’autocotisation. Vous ne le saviez pas ? Pourtant certaines banques offrent la possibilité de transférer les points des cartes de crédits affaires vers la cartes personnelles pour plus de discrétions. Si nous apprenions un jour qu’un ministre a utilisé ce stratagème banal dans sa vie passée, sera-t-il obligé de démissionner ?

Danger absolu de dérapage et de rater la cible !

Mais c’est le risque que l’on court lorsqu’on sème à tout vent la déesse  « éthique ».

À notre avis, dans la mesure où l’on associe l’intégrité à l’éthique personnelle, on pose la première pierre d’une série anarchique de termes pour la construction d’une nouvelle tour de Babel.

Cette référence biblique à la construction de la tour de Babel révèle les efforts insensés des hommes voulant atteindre le ciel (royaume de Dieu), et qui fut anéantie, par la suite, par l’incapacité de communiquer entre eux, causée par la confusion des langues.

La liberté du leader et de la gouvernance !

La probité et le désir d’intégrité doivent s’encadrer dans une philosophie intégrée. On ne peut pas être un peu ou presque intègre. L’Intégrité est un tout. Le leader responsable devrait alors se donner un cadre de gestion stricte pour lui et ses collaborateurs.

Personne n’aime être contraint dans sa liberté. L’éthique que l’on affiche ou que l’on pratique n’a peut-être qu’une mince couche de peinture.  La pseudo-transparence que l’on affiche pourrait n’en cacher que mieux ce que l’on ne veut pas montrer. Vilipender les conflits d’intérêts des autres permet d’évacuer un passé tout aussi trouble.

Question : Est-il alors possible d’assurer une bonne gestion, sous certains principes de probité, sans contraindre ne serait-ce qu’un peu la nature humaine, dans ses aspects les plus glauques ?

Réponse : La réponse est non. Les principes d’une Saine Gestion ou gouvernance limiteront toujours les esprits et les intentions troubles. Cependant, un cadre de Saine Gestion bien fait ne devrait en aucun cas limiter le leadership et l’atteinte des objectifs.

Différence fondamentale qu’offre le concept et le modèle de Saine Gestion

L’approche matricielle du modèle de Saine Gestion est une approche cartésienne et scientifique à élément fini, visant l’encadrement du comportement humain lorsqu’une mission de mandataire est confiée à un gestionnaire. C’est uniquement cette mission de mandataire qui justifie un comportement éthique que l’on aurait eu tendance autrefois à appeler simplement intègre ou de probité.

L’approche matricielle de la Saine Gestion est aussi une réponse à un tour de force que personne ne croit possible: Concilier tous les éléments de la gestion, de l’intégrité, de la reddition de compte en harmonie avec les objectifs et la raison d’être des institutions publiques, sans oublier les ressources humaines, l’équité, les conflits d’intérêts, la corruption et la banale mais non moins présente « humainerie » de toutes les bureaucraties.

Saine Gestion se situe aux confins des frontières où se rencontrent à la fois la responsabilité du mandataire, l’obligation de Saine Gestion et l’éthique du management.

À tout le moins, madame la première ministre, définissez avec clarté ce que vous entendez par intégrité car elle ne pourra jamais être autre chose qu’entière.

Une chaine n’est jamais plus forte que le plus faible de ses maillons !


12 comments

by Paul S at 09/20/2012

Excellent blogue. Pertinence, faudrait faire lire aux gens du PQ.

by Claude at 09/20/2012

Nous espérons tous un changement de culture, est-ce quelqu’un y croit vraiment ?

by Courage at 09/20/2012

Laissez la chance au coureur….

by landry at 09/20/2012

laissez la chance au coureur bis
J’aime encore mieux entendre parler d’intégité que de complément de salaire caché…
Voyons voir…comment contrer une culture de “scratch my back…..and i will scratch yours”…..

by Intégrité at 09/21/2012

Bonne idée pour un billet, mais un peu facile. Il ne faudrait pas traduire votre paranoïa en jeux de mots, parce que si on commence à analyser chacun de vos mots, même « saine gestion » y passerait car lorsque « saine » est antéposé au substantif, il a le sens de bon et normal, conforme à la raison, à un critère de valeur… Mais de quelle valeur parle-t-on ici? La vôtre Monsieur Brault?

by gilles at 09/21/2012

Entre deux termes galvaudés, la “réingénierie” de l’état de Charest et l’”intégrité” de Marois, je préfère l’intégrité même si, comme vous dites, il subsiste un doute. De toute façon, vaut mieux être intègre, peu importe le sens, que crapule et mouton insignifiant.

gilles

by cd at 09/21/2012

Une véritable tarte à la crème au visage de notre première Première Ministre! Mais doutez-vous sincèrement des intentions nobles de la grande dame?

by Bernard Brault at 09/21/2012

Monsieur Intégrité et anonyme,

L’ISG à pour mandat de commenter les enjeux de l’actualité en matière de gouvernance. Nous ne faisons aucune mention de nature politique, sauf si elle touche notre champs d’expertise et d’intervention. L’ISG n’est ni de gauche ni de droite.

Saine Gestion offre simplement du vocabulaire et un concept développé par une équipe multidisciplinaire depuis 20 ans. Saine Gestion est un concept qui regroupe des principes reconnus (6) transparence continuité efficience équilibre équité et abnégation, qui ont été articulé dans une matrice. (portion originale du modèle de Saine Gestion et non de Bernard Brault) Cette matrice assure simplement une référence plus stricte pour pour ceux et celles qui désirent vraiment agir en fonction de ce qu’ils disent.

N’ayant pas le monopole de vérité, nous espérons seulement que le mot intégrité ne devienne simplement un écran de fumé, comme dans plusieurs organismes et municipalités dont les élus et les conseils d’administration se sont drapés de code d’éthiques flamboyant.

Les signatures anonymes écorchent aussi un peu le principe de transparence.

by Stéphane at 09/21/2012

Vous avez raison, Le gouvernement précédent et monsieur Legault ont aussi utilisé le terme intégrité, donc il est juste de s’assurer que cela ne reste pas au niveau des babines…..

by Bernard Brault at 09/21/2012

Je ne doute en aucun moment des ses intentions nobles, je crains que seulement l’intention ne puisse contrer la nature humaine, l’humainerie. Si vous lisez mon blogue jusqu’à la fin vous comprenez qu’une certaine génération de gestionnaire n’a pas complètement la conscience tranquille. Si vous saviez le nombre de commentaire aberrant que j’ai recu depuis 3 ans… a l’ISG

Je ne voudrais pas être à sa place lorsque toute la communauté de l’opposition cherchera le moindre détail pour tirer à boulet rouge.

Un cadre de Saine Gestion serait sans doute un outil.

by Claude at 09/21/2012

Monsieur anonyme, Les valeurs de saine gestion sont la transparence ( a moins que ne soyez contre ) la continuité a moins que préfériez empocher a court terme ) l”efficience l’équilibre l’équité et l’abnégation ( celui la peut-être vous agace, par ce que l’intégrité en dépend ) donc avant de dire n’importe quoi, lisez donc les textes de l’ISG.

Pas si bête que ça ?

by Claire P at 09/21/2012

Je ne vois pas en quoi monsieur Brault lance une tarte à la crème. Je vois au contraire beaucoup de neutralité dans sons texte, même si cela vous dérange monsieur intégrité anonyme

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